Ouest France : «Panser les plaies par les mots»

Article paru le 7 mars 2012 sur le quotidien français du Ouest France le 7 mars 2012

À Rennes, lassociation « Les Amis de lAlgérie » tente, par léchange, de dépasser le fardeau de la douloureuse histoire entre la France et lAlgérie.

Lorsque l’on demande à Toufik Hedna ce qui l’a attiré vers Rennes, il explique que le slogan de la ville a joué une part importante : « Vivre ensemble ». Le fondateur de l’association « Les Amis de l’Algérie », explique que les mots, de l’autre côté de la Méditerranée ont une importance capitale. « Les slogans, les devises, continuent à avoir un impact en Algérie, quelles que soient les générations », raconte-t-il.

Cette association tente justement de panser les « plaies » de l’histoire entre la France et l’Algérie, par le dialogue, le partage. Une initiative délicate à mener. 1 400 à 1 500 Algériens, inscrits sur les listes officielles du consulat d’Algérie, vivent aujourd’hui à Rennes. Mais il y a aussi les non-inscrits, et les Français qui ont vécu là-bas. Chacun a son vécu personnel et souvent douloureux. Partis de Sétif, Oran, Alger ou Tlemsen, ils sont arrivés à Rennes pour rejoindre leur famille, ou pour trouver du travail. Certains ont quitté le pays dans les années 60 et gardent toujours en tête le traumatisme de la guerre. « Ils ont tout laissé, là-bas », explique Toufik Hedna. D’autres, ont quitté l’Algérie dans les années 70 ou 90. Quelques-uns continuent de penser que le terrorisme y est toujours présent.

Génération volontaire

Mais les choses évoluent. « Harquis, pieds noirs, fils ou filles d’anciens immigrés, musulmans ou non, peu importe, ils sont une centaine, membres ou sympathisants de l’association, à répondre présents au débat et à la réflexion. Ces discussions permettent de surmonter le fardeau de l’histoire, de transmettre un savoir rationnel, c’est-à-dire l’ouverture des frontières et des esprits. Car la vie est beaucoup plus riche que la guerre d’Algérie », souligne M. Hedna. Il rappelle les similitudes culturelles qui peuvent exister entre la France et l’Algérie. À commencer par la langue.

« Le débat est aussi un moyen pour les Algériens ou les Français d’exprimer leur mal du pays », ajoute Toufik. Certains, trop meurtris par les conditions de leur départ, refusent de retourner en Algérie. D’autres voudraient renouer avec ce territoire. Toufik Hedna les encourage à franchir le pas et à découvrir un pays en pleine mutation. « Nadia, une membre de l’association, est retournée à Sétif pour la première fois depuis son enfance, raconte M. Hedna. Elle a été très surprise par le dynamisme des jeunes. Cette génération, en Algérie comme à Rennes est très volontaire, résolument tournée vers l’avenir. Une chose que l’on n’a pas vu depuis longtemps », s’enthousiasme l’animateur de l’association.

Nadia serait revenue très heureuse en France. Une joie qu’elle a partagée avec les autres membres des « amis de l’Algérie ». Elle essaie aujourd’hui de retourner régulièrement dans son pays natal. « C’est l’illustration-même d’un célèbre proverbe algérien : celui qui a goûté au miel, en redemandera plus tard », conclu Toufik Hedna.

 

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